Je vise le 15.09. J’ai peur. J’ai planifié tout ça dans un élan d’excitation en me disant que c’était à ma portée, si je le voulais vraiment, et j’en reste persuadée. Mais ça y’est, l’excitation des préparatifs laisse place à l’anxiété.

Je n’ai pas potassé le trajet pendant des jours sur mon topo guide. Je n’ai appelé aucun hébergement, rien booké. Je ne prévois pas des kg de nourritures. J’ai vaguement regardé les points d’eau. J’ai survolé le truc, en voyant tous ces gens sur les groupes Facebook, sur les forums essayer de planifier avec frénésie chaque tronçon, chaque mg dans le sac. Je les lis, sourire en coin, raconter à quel point « attention, surtout pas plus de 10% de votre poids dans le sac » « attention aux tiques » » attention aux puces de lit » « attention : réservations 7 mois à l’avance pour les gîtes » « présentation de mon sac de nourriture d’autonomie » « y’a t il suffisamment d’oiseaux pour que j’emporte mes jumelles? » (véridique)

Combien de fois j’ai vu des « aujourd’hui j’ai parlé a une marcheuse avec laquelle j’ai tenté de communiquer et elle m’a envoyé boulé me disant qu’elle voulait être seule ! C’est quoi cette mentalité ? Vous êtes tous comme ça sur le chemin ? » qui se galvanisent d’incarner l’état d’esprit du chemin; l’unique, le seul et qui ne se rendent même pas compte qu’ils sont la personification même de l’intolérance.

Je n’ai rien trouvé d’intéressant là bas à part quelques obsessionnels du contrôle, de la bêtise et d’égocentrisme.

Bon. Cela dit je ne fais plus trop la fière.

Mon sac est posé dans un coin de mon salon. Sifflet et casquette accrochés aux mousquetons. Presque prête à partir. Plus les jours passent, plus mon matériel est complet. Et, surtout, plus j’angoisse. < Et si j’ai froid ? – merde j’ai pas de doudoune – merde ça va pas rentrer – et si je finis sous la flotte avec duvet mouillé ? – je devrais prendre mon imper en plus de mon poncho de pluie – et si je trouve pas d’eau – et si je me retrouvais à flipper en pleine nuit en bivouaque ? Et si cette épicerie était fermée ? – et si je me retrouvais avec un connard qui me veut du mal en pleine nuit? Merde. J’ai rien pour me protéger de ça. – merde c’est lourd quand même.

⁃ Je porte le poids de mes peurs.

J’ai monté ma tente une seule fois. Je galère à rentrer mon sac de couchage dans sa housse. Je peine même à organiser mes affaires alors que mon sac n’est même pas plein. Je ne sais pas ce que je fous ni pourquoi je m’inflige ça. Tout le monde me dit que je suis folle. « Mais pourquoi seule? » « tu pars pas si tu nous envoies pas ta position tous les jours » « mais tu t’es même pas entraînée un minimum » « dormir dans la nature ? T’as pas peur?! »

⁃ Mes peurs + celles des autres

Je traîne presque du pieds et je rechigne à focaliser mes pensées sur cette rando alors que j’étais vraiment excitée à l’idée de partir.

Je dois souffler et me lancer. Je peux le faire.


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